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« Le Premier ministre est en train de former son gouvernement, il devrait penser à créer un ministère de l’Injustice ! » Au petit matin de ce vendredi 20 septembre, Franck, Dominique et Jean-François scrutent, encore incrédules, la décharge sauvage qui s’étale à perte de vue sous leurs yeux. « De la folie douce ». La conséquence de l’occupation illégale d’une quarantaine de familles Roms entre juin et octobre 2023 à Osny (Val-d’Oise).
2 millions d’euros
Délogées de leur campement de fortune par les forces de l’ordre, elles ont abandonné derrière elles une montagne de déchets, formée au rythme d’un trafic bien rodé au scénario intangible : il consiste pour des entreprises du bâtiment à faire appel aux Roms afin de se débarrasser à moindre coût de leurs déchets. Un modus operandi identique à celui qui a prévalu à la naissance de la décharge de la plaine des Linandes, à Cergy.
Pneus, tines de peinture, gravats en tous genres, plaquette publicitaire d’une salle de spectacles parisienne, vestiges d’un cabinet dentaire, matelas… Une poubelle XXL a pris racine sur ces anciennes terres agricoles nichées dans le quartier du Fond de Chars, en bordure de la D 915. Des terres où on ne cultive plus rien depuis les années 50 et l’irruption dans le paysage d’une ligne haute tension qui domine ce no man’s land traversé par le chemin de Montgeroult. Des parcelles aujourd’hui détenues par une quinzaine de propriétaires.
Des terres sans valeur qu’ils pensaient à l’abri des convoitises jusqu’à ce que la mairie d’Osny leur demande des comptes. En mars, elle leur a adressé une « mise en œuvre de la procédure contradictoire avant mise en demeure ». Traduction : la municipalité enjoint les propriétaires à procéder sans délai à l’évacuation des déchets. En cas de refus, ils tomberont sous le coup d’une amende de 150 000 euros et d’ »une astreinte journalière au plus égale à de 1 500 euros ».
« On nous somme de payer le nettoyage des terrains, alors que dans cette affaire, nous ne sommes pas coupables, mais innocents. »
Montant de la facture, selon un devis établi par une entreprise spécialisée : 2 millions d’euros ! Dépôts de plainte, courrier aux ministères de la Transition écologique, de la Justice, de l’Intérieur, au procureur, aux élus… La poignée de propriétaires a frappé à toutes les portes pour plaider sa bonne foi. Jusqu’ici en vain.
« Nous ne sommes pas coupables »
Et la mairie a beau affirmer travailler à une solution (lire encadré), ils ne sont guère rassurés, conscients que le couperet peut, à tout moment, tomber. « Je ne vois pas comment on va faire pour s’en sortir. Cette histoire peut foutre en l’air notre vie, une vie de travail. Financièrement, on ne peut pas payer et, quand bien même nous le pourrions, sur le principe, nous ne sommes pas d’accord ! On doit faire quoi ? Vendre nos maisons ? En faire subir les conséquences à nos enfants en leur laissant des dettes ? On refuse de payer pour un délit que nous n’avons pas commis. Ces terrains, ça fait des années qu’on cherche à s’en séparer sans y parvenir. Pour nous, c’est un boulet… »
La position de la mairie
La « situation est plus complexe qu’il n’y parait », indique d’emblée la municipalité d’Osny. Soulignant que la procédure qu’elle a engagé contre les propriétaires, « parfois peu préoccupés par leurs terrains », est « susceptible d’aboutir à diverses mesures, dont certaines sont effectivement d’ordre financier, dans le but exclusif de faire respecter la règlementation en matière de déchets et, avec elle, d’éviter des risques environnementaux ou sanitaires », la commune précise qu’elle « accompagne néanmoins les propriétaires privés, lesquels ont été reçus en mairie, se sont regroupés dans un collectif et sont en outre désormais assistés d’une avocate en droit de l’environnement ».
Et de poursuivre : « Ensemble, la commune et les propriétaires cherchent à coconstruire une solution globale permettant d’aboutir au nettoyage effectif des terrains, dans le respect des enjeux environnementaux et sans ignorer les contraintes financières que cela peut représenter pour des particuliers. À ce titre, la commune sollicite d’autres administrations ainsi que des opérateurs privés dans le but qu’un projet autour des énergies renouvelables (une ferme photovoltaïque est évoquée, ndlr) puisse voir le jour sur ce secteur ».
Enfin, la commune « rappelle cependant que le droit de propriété confère aussi des obligations à son titulaire et qu’elle ne peut pas se substituer automatiquement à des propriétaires éventuellement défaillants en faisant alors peser des dépenses supplémentaires sur les finances communales et donc sur les administrés. »
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