
Il n’est pas encore 22 heures quand deux hommes cagoulés surgissent dans la salle de la mairie où les élus PS de Saint-Denis se réunissent, comme tous les lundis soir. Dans leurs mains, des armes de poing. Dans leurs bouches, des menaces de tuer tout le monde. « Où sont les places ? » Nous sommes le 15 mai 2006. Dans 48 heures aura lieu la finale de la Ligue des champions de football au Stade de France, entre Barcelone et Arsenal. Les deux braqueurs savent que la municipalité dispose d’une cent-cinquantaine de billets attitrés, à distribuer au sein d’associations locales.
« A ce moment précis, nous étions dans le bureau du maire en train de répartir les places. A l’époque, elles se négociaient à prix dingue », se rappelle Gilles Smadja, alors directeur de cabinet du maire de Saint-Denis, Didier Paillard. Preuve que les malfrats étaient relativement bien informés, pas suffisamment toutefois puisqu’ils se sont trompés de salle. Pour convaincre les conseillers municipaux de leur livrer les précieux tickets, les assaillants mettront même en joue un adjoint au maire, en commençant à compter. « Un, Deux… » Ils n’iront finalement pas jusqu’à trois et repartent les mains vides. Ce fait divers constitue une forme de précédent, ou, selon le point de vue, d’exception à la règle qui voulait, jusqu’au samedi 28 mai 2022, que les finales au Stade de France se déroulent dans la joie et la bonne humeur. « On a organisé les plus grands évènements au Stade de France et il n’y a jamais eu un problème, il n’y a jamais eu un tag. D’où ma stupéfaction concernant ce qui s’est passé », réagit Patrick Braouezec, maire de Saint-Denis entre 1991 et 2004 puis président de l’établissement public Plaine Commune jusqu’en 2020.
Ce soir-là, en marge du match Real Madrid-Liverpool et des ratés de l’organisation policière, de nombreuses agressions auraient eu lieu devant le stade, selon le récit de plusieurs témoins. « Beaucoup de supporters ont été agressés, harcelés, dévalisés et volés avec violence », a par exemple affirmé le Real Madrid dans un communiqué. Des heurts qui ont poussé Eric Zemmour à dénoncer, comme il l’a souvent fait, « l’avènement de racailles qui font la loi ». Stéphane Troussel, le président du conseil départemental de la Seine-Saint-Denis lui a alors répondu qu’il n’acceptait pas que « l’extrême droite se déchaîne contre son objet de haine favori, la Seine-Saint-Denis et ses habitants ».
« Une politique qui désenclave »
Jusqu’alors, l’histoire mêlée du Stade de France et de la Seine-Saint-Denis avait plutôt été faite de beaucoup de fierté, même si certains espoirs ont été déçus. Dans leur rapport consacré à l’action de l’Etat en Seine-Saint-Denis, en mai 2018, les députés François Cornut-Gentille et Rodrigue Kokouendo rappellent la phrase prononcée par le Premier ministre Alain Juppé au moment de la construction du grand stade, en 1995 : « L’installation d’un équipement phare peut être l’occasion pour donner une impulsion décisive à une politique de la ville. Une politique qui désenclave, qui rapproche, qui redonne une fierté et assure un vrai développement ». Les parlementaires notent avec ironie que « l’impulsion est restée sur la piste d’athlétisme du Stade de France ».
Vingt-sept ans plus tard, la Seine-Saint-Denis reste le département où la population dispose du plus faible niveau de vie de France métropolitaine, avec un taux de pauvreté de 28,6 %. « Mais l’installation du Stade a permis la création d’un nouveau quartier et a redonné de l’estime de soi à tous les habitants de la banlieue », estime Patrick Braouezec. L’ancien député se souvient qu’au départ, le Grand Stade, comme on l’appelait alors, devait plutôt se situer à Sénart, la ville nouvelle située à cheval entre l’Essonne et la Seine-et-Marne. Mais Jacques Chirac, alors maire de Paris, trouvait le lieu trop loin de Paris. Lorsque la droite revient au pouvoir, en 1993, décision est prise de s’implanter plutôt à Saint-Denis. « On a demandé à avoir la couverture de l’autoroute, deux RER et des conditions d’ascension sociale pour les habitants », relate Patrick Braouezec. « Pour la première fois, on disait à la banlieue qu’elle était digne d’accueillir un grand évènement international », ajoute-t-il. Dès l’inauguration du stade, une dynamique s’enclenche. « De grandes entreprises s’installent à proximité, le Stade de France donne naissance à un nouveau quartier, la Plaine », raconte Gilles Smadja, qui ne nie pas que ce secteur plus cossu reste un peu coupé du centre-ville de Saint-Denis et des communes avoisinantes.
Pour faire goûter au tissu associatif local les bénéficies du grand stade, des évènements festifs et des distributions de places sont invariablement effectuées à Saint-Denis et dans les villes adjacentes. « Ça contribuait à apaiser les choses », estime Patrick Braouezec. Une tradition maintenue encore aujourd’hui : dans une allocution, le 3 juin dernier, Mathieu Hanotin, l’actuel maire de Saint-Denis, affirme que « jusqu’aux environs de 19 heures, ce samedi 28 mai, l’accueil de la finale de la Ligue des champions a eu un vrai parfum de fête à Saint-Denis ». Il rappelle le tournoi de football organisé en parallèle dans la ville en présence de Zinédine Zidane, le « grand tirage au sort » pour obtenir les précieux tickets, l’organisation d’une « fan zone » de supporters du Real Madrid au centre-ville, sans problème particulier.
« On les connaît nos loulous »
Que s’est-il donc passé aux abords du Stade de France ? Stéphane Troussel y a vu des rassemblements de « voyous venus de toute l’Ile-de-France ». Patrick Braouezec penche lui pour l’effet d’aubaine : « On les connaît nos loulous, quand il y a une faille, ils s’engouffrent dedans ». Ayant senti la police en difficulté, des bandes en auraient profité pour semer la pagaille. Gilles Smadja penche lui aussi pour cette hypothèse, arguant « que la finale de la Ligue des champions est un cas de figure à part, incomparable à un match type Nice-Nantes, qui n’électrise pas les foules ». Il ajoute « quand il y a des équipes anglaises, on sait que ces finales sont à risques ». Son raisonnement ? Les supporters britanniques ayant la culture des billets achetés au marché noir, à la dernière minute, leur venue attire ceux qui espèrent faire des affaires. Le récit de Bilal, un coiffeur de Saint-Denis, rentré sans billet au Stade de France, atteste que certains habitants ont tiré avantage de la situation, sans préméditation. Auprès de Touche pas à mon pote, l’émission de Cyril Hanouna sur C8, il a expliqué s’être rendu devant le stade « par curiosité », avant de profiter de la cohue pour s’incruster dans l’enceinte.
Aujourd’hui, la fièvre du samedi 28 mai semble être en passe de retomber. Le match France-Danemark, samedi 4 juin, s’est déroulé dans un climat apaisé. Après les incidents de Real Madrid-Liverpool, 48 personnes ont été placées en garde à vue et six d’entre elles ont été jugées en comparution immédiate. Pas suffisant toutefois pour les associations de supporters de Liverpool et du Real, qui demandent des excuses, des explications et une enquête sur les dysfonctionnements.
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