Marne : l’hommage rendu à l’abbé Jean Brion curé de Clamanges

Il y a quatre-vingts ans, le 22 juin 1944, la gestapo menait une série de dix-neuf arrestations dans l’arrondissement d’Epernay, d’Avize à Vertus en passant par Pocancy et Clamanges. Dans ce dernier village le curé Jean Brion qui donnait une leçon de catéchisme à une douzaine d’enfants âgés de neuf à douze ans et qui avait juré de ne jamais être pris vivant tente d’échapper à la gestapo. Il est abattu et achevé. Le Vendredi 21 juin 2024, dans la salle communale, ce sont près de quatre cents personnes dont les enfants de l’école du Val-des-Marais et des collégiens de la classe de défense de Vertus qui lui ont rendu hommage au cours d’une évocation historique et de plusieurs cérémonies qui se sont succédé, sur le lieu où il est mort pour la France, au monument aux morts où une plaque lui est dédiée, devant l’église où un petit monument rappelle son sacrifice. Une messe a été présidée par le père Denis Vejux, administrateur diocésain.

Voici l’allocution que j’ai prononcée :

« Mesdames, Messieurs,

Chers enfants,

Oui Clamanges se souvient ! Si nous sommes rassemblés cet après-midi, au bord de la Somme à l’endroit même où, le 22 juin 1944, l’abbé Jean Brion, curé  du village mais aussi de Pierre-Morains, Trécon, Villeseneux, Ecury-le-Repos, chef de trentaine, a été assassiné par des agents de la gestapo c’est que nous avons à cœur de ne pas oublier celui qui a si bien incarné la Résistance des vicaires pendant la Deuxième Guerre mondiale et a été au sein du maquis de Trecon, un homme de foi et un soldat engagé avec ses camarades pour concourir au mieux à la Libération de la France.

La tragédie qui s’est déroulée dans ce village résulte d’une action d’envergure décidée par l’occupant, deux semaines après le Débarquement réussi par les Alliés en Normandie, conscient que le maillage territorial efficace mis en place dans l’arrondissement d’Epernay par l’équipe du capitaine Pierre Servagnat représentait un danger, chaque jour plus important, en raison de la mobilité et de la capacité d’action manifestée par les groupes locaux, parfaits relais des instructions diffusées et de leurs applications.

L’ennemi frappe, les agents de la gestapo plus féroces que jamais et s’en prennent aux femmes lorsqu’ils ne surprennent pas les maris. Ainsi, Eliane Bonnet, une Vertusienne enceinte est appréhendée à la place de son époux, Henriette Renault est capturée dans le café qu’elle tient, Mélina Grosjean subit le même sort dans sa ferme de Trécon sous les yeux de Lucien Bry. A Avize trois familles sont appréhendées les Laforest, Lemaire, Stocker et comme cela ne suffit pas l’abbé Vatel et Roger de Cazanove, adjoint au maire sont pris en otage. A Pocancy le meunier Pierre Leroy et René Maricot, chauffeur au château, MM. Arnould Roger Richomme sont embarqués. A Vertus, la gendarmerie est dans le collimateur. Le maréchal des logis chef, Léon Bouché, les gendarmes René Parizot et Henri Bonsergent sont privés de leur liberté. Ils ne reviendront jamais de déportation. Et les épisodes dramatiques se succèdent.

A Clamanges, la petite porte de la nef sud de l’église grince et s’entrouvre, ne laissant passer qu’une main. C’est l’heure du catéchisme et l’abbé Jean Brion rappelle à l’ordre la douzaine d’enfants âgés de 9 à 12 ans dissipés par le bruit. Il reprend sa leçon pendant une minute. La porte s’ouvre une deuxième fois mais en grand et un soldat armé apparaît. L’abbé est piégé mais avec sang-froid, il prétexte la prise de quelques effets au presbytère pour s’enfuir, probablement en sautant par une fenêtre pour filer au plus vite vers la Somme où existe une passerelle pour se mettre à l’abri. Un soldat l’aperçoit, tire et le touche. L’abbé qui s’est juré de ne jamais être pris vivant par l’ennemi reprend son effort, sur environ deux cents mètres, avant de s’affaisser. Puis d’être achevé sur place.

Avec un rare cynisme, les Allemands s’emparent du cadavre de l’abbé qu’ils abandonnent dans le pré de M. Lallement avant qu’un officier s’adresse à Mme Rigaux, l’épouse de l’instituteur et secrétaire de mairie en ces termes : « Votre curé est tué, allez le chercher ! ». Choquée et indignée Mme Rigaux sollicite les fils Voillereau pour s’occuper de la dépouille du martyr. L’abbé Jean Brion est ramené au presbytère, mais les agents de gestapo interdisent qu’il soit allongé sur un canapé ou sur un banc. Il repose alors à même le sol dans le couloir.

Albert Moreau, le maire de Clamanges qui est de retour des champs vers 11 heures est hélé par un Allemand : « Voyez ce que nous avons trouvé chez lui : un revolver anglais et un chargeur ». Une perquisition approfondie englobant la sacristie et les autels de l’église sondés à coups de bottes est conduite à son terme. Le maire se démène pour obtenir l’autorisation d’organiser les obsèques de l’abbé. Il fait prévenir la famille de Jean Brion qui réside à Fère-Champenoise par M. Guyot.

L’occupant ne va pas se gêner d’intervenir sur l’organisation des funérailles qui sont fixées au samedi 24 juin 1944 à 7 h 30. Trente personnes, clergé compris, sont autorisées à y participer alors qu’une quinzaine de gardes mobiles sont disposés autour de l’église de Clamanges. Le curé doyen de Vertus préside, entourés des curés de Soudron, Lenharrée, Vouzy, Bergères-les-Vertus qui concélèbrent l’eucharistie.

Le cercueil de l’abbé Jean Brion est ensuite transféré au cimetière de Fère-Champenoise. Trois véhicules de la police allemande stationnent à une cinquante mètres et leurs occupants surveillent l’inhumation.

On n’oublie pas l’abbé Jean Brion. Le groupe de Vertus dirigé par Fernand Fayon prend son nom et en juillet 1944 attaque un convoi ennemi en faisant sauter le premier véhicule au moyen d’explosifs dissimulés sous des planches, puis l’allume au fusil-mitrailleur et à la mitraillette. Cette nuit-là, huit miliciens sont tués. Quelques jours après, le groupe Jean-Brion cible une voiture allemande à Pierre-Morains. Deux officiers ennemis périssent, un soldat est blessé et le véhicule confisqué. Et ses actions de guérilla ne sont pas achevées. Pour les FFI d’Epernay et de sa région la tâche est complexe. Il y a des succès, des échecs aussi. Des blessés et des morts. Et cela jusqu’à la libération où les résistants d’ici ont également fait des prisonniers et saisi du matériel.  

Oui Clamanges s’est souvenu. A vous les plus jeunes prenez le relais comme l’ont fait vos aînés pour qu’on n’oublie jamais ce qui s’est passé ici, pour que le courage et le sacrifice de l’abbé Jean Brion soient rappelés. Pour que le récit de la Résistance et de la Libération demeurent un chapitre majeur de l’histoire du XXe siècle ».

Source

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