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Le président du conseil départemental des Yvelines, Pierre Bédier, nous a accordé un entretien sur les dossiers du Département, la politique en général après les élections européennes et législatives et les futures échéances comme les municipales en 2026.
Il a été réélu en 2021, après avoir été élu en 2014 et en 2005. Avec son caractère bien trempé, il dit souvent ce qu’il pense, sans détour. À bientôt 67 ans il connaît bien les Yvelines, depuis au moins les années 1983 quand il fut conseiller municipal de Poissy avant de partir à Mantes-la-Jolie.
Quelles réflexions vous inspirent les JO Paris 2024 dont une grande partie s’est déroulée dans les Yvelines ?
Ça a été un moment de pur bonheur. Nous étions le 3e département d’accueils des JO (5 sites derrière la Seine-Saint-Denis et Paris, N.D.L.R.). C’était remarquablement bien organisé. Il faut rendre hommage au service de l’État, aux collectivités, qui ont œuvré ainsi qu’à tous les bénévoles. Il faut rendre aussi hommage aux Français qui ont ambiancé, qui ont aimé, poussé, hurlé et qui ont fait que la dimension festive a bien été au rendez-vous.
Qu’est-ce qu’on peut en garder en héritage ?
Je rappelle que le vélodrome et un héritage des Jeux de Londres. On l’avait imaginé et subventionné dans la perspective de la victoire de Paris face à Londres. La colline d’Elancourt restera bien sûr. Au château de Versailles, on voit les grilles, les parterres qui ont été refaits. Et ce qu’on ne voit plus, c’est cet affreux moulin qui se trouvait dans la perspective du grand canal, dans la plaine de Versailles, à Saint-Cyr-l’École et qui a disparu. On hérite donc d’un département encore plus beau grâce aux Jeux.
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Pierre Bédier : « Nos dépenses auront augmenté de 10 % en 2 ans »
La baisse des droits de mutation a grevé les recettes du Département. Qu’en est-il aujourd’hui ?
Aucun changement à l’instant où je vous parle. La baisse des droits de mutation continue. Quand je dis baisse, c’est l’effondrement. Ces droits de mutations, qui sont le seul impôt que perçoit le Département, représentent 40 % de notre budget et à la fin de l’année, si ça continue comme cela, ils auront fondu de moitié.
Qu’est-ce que cela signifie ?
Ça veut donc dire qu’en deux ans, le Département aura perdu 20 % de ses recettes. Pendant ces deux années, à la fois les besoins sociaux comme l’augmentation du nombre d’allocataires du RSA, le vieillissement de la population qui entraîne l’augmentation, l’Allocation personnalisée d’autonomie (APA) ainsi que les décisions de l’État qui continue d’être généreux avec l’argent des autres, font que nos dépenses auront augmenté de 10 % en deux ans et ce, malgré nos efforts. C’est un écart de 30 %.
Il fallait que le Département fût bien géré pour supporter ce choc, mais maintenant nous sommes à l’os.
Nous ne sommes pas en déficit. Mais nous n’avons plus les capacités financières de faire autre chose que les dépenses obligatoires : les dépenses sociales pour le compte de l’État, qui ne nous rembourse pas en totalité.
Si l’État nous remboursait en totalité, il n’y aurait pas de problème. Les 600 M€ que nous faisons pour le compte de l’État, il ne nous en rembourse que 400 M€. Les 200 M€ sont payés par les Yvelinois.
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Et pour les communes ?
Nous sommes en train de réduire toutes les politiques non obligatoires mais qui n’étaient pas des politiques gadget. Je pense au logement. Nous accompagnions les communes par des subventions pour financer des équipements publics, de façon substantielle quand les communes construisaient des logements. C’est une politique qu’on a été obligé de suspendre.
Même chose pour l’aide aux quartiers de la politique de la Ville (QPV) qu’on aidait généreusement puisque les Yvelines finançaient plus que l’État. Désormais on réduit notre soutien à la portion congrue. Il est possible que cette portion soit encore plus congrue dans les mois qui viennent.
C’est un très, très grand changement qui m’occupe et qui occupe l’ensemble de la structure administrative du Département. Il faut faire aussi bien avec beaucoup moins, si je devais résumer.
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Et ces communes qui regrettent les aides aux transports coupées par le Département ?
Oui, nous avons coupé certaines aides. Nous étions le seul Département d’Île-de-France à donner une aide aux familles sur le transport scolaire. Encore une fois, elle n’était pas obligatoire. Nous n’avons plus l’argent pour le faire. Pour autant, nous continuons nos efforts : on a limité la hausse du prix des cantines scolaires. C’est une dépense obligatoire que nous supportons dans des proportions considérables.
Nous payons la moitié du prix de revient du repas. On s’efforce de limiter cette augmentation pour garder une politique favorable aux familles. Ce sont des arbitrages difficiles à rendre. On essaie de faire les meilleurs choix mais oui, nous sommes dans une logique de suppression de services, de suppressions de subventions ou de baisses. J’ai même été amené à engager, croyez-moi avec des réticences mais c’était nécessaire, un plan de départ volontaire (au Département, N.D.L.R.) que j’ai annoncé au mois de juin afin de baisser nos dépenses salariales.
L’été a été marqué par les élections Européennes, avec la poussée RN, les législatives et un parti LR ébranlé avec le départ de Ciotti ?
Sur la question des législatives, la très bonne nouvelle c’est qu’il n’y a pas eu de député du Rassemblement national dans les Yvelines. Ça tient à la fois à la qualité des désistements républicains et à la volonté des électeurs. Je le rappelle, on dit que c’est scandaleux mais ce sont les électeurs qui décident. Ce n’est pas parce qu’on appelle à voter que les gens sont obligés de voter.
Ça tient aussi à la vanité des lepénistes qui ne se sont pas alliés avec les zemmouristes. Dans ce département, étant donné les scores très élevés des zemmouristes, s’ils s’étaient mariés, ce que je supposais, je pense qu’ils pouvaient l’emporter dans trois circonscriptions. La bonne nouvelle, c’est qu’ils n’ont pas réussi.
Comment voyez-vous l’évolution politique du département qui a été UDF, RPR puis Macroniste ?
L’analyse que vous faites sur notre département est juste mais les mots que vous donnez UDF, RPR et Macronistes, ça s’appelle la droite modérée. C’est un département de la droite modérée, de centre-droit.
J’ai connu un RPR très à droite qui avait du mal à percer à l’époque de l’UDF. Puis le RPR, sous l’influence de Jacques Chirac, de ses élus locaux est devenu progressivement, avec un socle gaulliste, de centre droit.
Puis le Macronisme, dans les Yvelines est un macronisme de centre-droit. Le seul qui venait de gauche, était le député de Versailles (Didier Baichère, N.D.L.R.) et ils ne l’ont pas gardé. On garde le même socle mais on change les initiales. Tout cela doit pouvoir se retrouver au niveau local dans Ensemble pour les Yvelines.
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Que sera EPY dans l’avenir ?
Je vais prendre l’initiative quand la situation politique nationale sera stabilisée, pour que ce rassemblement de coopérations de cette droite modérée, puisse se retrouver pour les élections municipales sous le drapeau Ensemble pour les Yvelines. J’ai cru comprendre que comme le MoDem fait déjà partie de EPY, de même qu’Horizons, Renaissance doit pouvoir participer avec nous, je l’espère. Cette droite modérée va se mettre en coordination dans la perspective d’une élection locale.
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Mais le LR d’Othman Nasrou aura sa place ?
Le LR d’Othman Nasrou fait partie de ce centre droit puisque LR (sur le plan national) dit, il faut qu’on travaille pour servir le pays. La position qui consiste à dire, on va avoir des candidats partout [la position du président LR des Yvelines aux législatives] n’existait pas. J’ai été président de la Fédération LR des Yvelines [Il a quitté LR cet été] qui a été l’une des plus puissantes de France mais qui s’affaiblissait, année après année, pour des raisons de décisions nationales.
On est bien incapable aujourd’hui de présenter des listes partout. Il ne faut pas jouer les tartarins (vantard) des Yvelines. La voix de la raison est en train de l’emporter. Ce centre droit modéré dont fait partie LR, puisqu’encore une fois LR l’assume (sur le plan national, N.D.L.R.), doit se réunir et je suis persuadé qu’on va y arriver.
« Je suis très content que LR ait décidé de participer au gouvernement. On m’a présenté comme un traître à la patrie LR »
Justement on parle des LR, que pensez-vous de la nomination de Michel Barnier au poste de Premier ministre ?
Je suis très content que Michel Barnier ait été nommé. Je suis très content que LR ait décidé de participer au gouvernement. C’est ce que j’explique depuis des mois et des mois. On m’a présenté comme une espèce de traître à la patrie LR parce que je disais la nécessité de s’accorder avec Monsieur Macron sur des bases programmatiques fortes et claires. Sans aller à la soupe mais servir l’intérêt national. Je suis très heureux qu’on y arrive.
Qu’allez-vous faire lors des municipales 2026 ? Vous y pensez en vous rasant avec un point de chute ?
Je vous confirme que je pense, tous les matins, aux élections municipales pour pouvoir créer la dynamique politique programmatique et humaine qui fasse que les Yvelinois aient les meilleurs maires possible. Un mauvais maire dans une commune, et j’ai pu le voir dans bien des cas, cela peut être un drame. Je reprends la formule de Larcher : « La commune, c’est la petite république dans la grande ». Un mauvais maire, de mauvaises décisions, un programme démagogique : ça peut envoyer dans le mur la commune. Ensuite, on met des mois, des années à la redresser. J’ai dû redresser une commune en 1995 (Il parle de Mantes-la-Jolie) avec un niveau d’insécurité jamais atteint, une ville quasi en faillite.
Vous pourriez redresser encore une commune des Yvelines qui serait mal gérée ?
Je ne peux pas présider deux exécutifs (sic !). On ne devient pas maire comme cela. D’abord il faut que les habitants le souhaitent. Je vous confirme qu’à Mantes-la-Jolie, puisqu’il s’agit de cela, chaque fois que je me promène dans la rue, on me demande si je reviens.
Je vais vous répondre : j’ai été maire de Mantes-la-Jolie, j’y ai eu des soucis gigantesques mais des bonheurs sans commune mesure. Je considère que mon devoir est d’aider à ce que la ville ait un bon maire mais en aucun cas à penser que je suis l’avenir de Mantes-la-Jolie. Même si j’ai fait les 10 km du marathon pour tous (aux JO Paris au mois d’août), j’ai quand même conscience que je ne suis plus le jeune athlète que j’ai été.
« Il y a une incertitude sur le nombre de RER qui vont circuler. J’espère que cette incertitude sera rapidement levée. »
Pour le Département des Yvelines, nous sommes quasi à mi-mandat. Quelles sont vos réussites ? Vos regrets ?
On va commencer par les regrets. C’est de ne pas pouvoir faire tout ce qu’on avait prévu de faire puisque la situation financière ne le permettra pas. Mais de dire toute la fierté d’avoir fait ce qu’on a déjà fait. Les Yvelinois vont le découvrir. On va inaugurer l’école des Mines à Satory à la fin de l’année. C’est le porte-avions de la recherche, de l’excellence française universitaire. L’École des Mines, ce sont les meilleurs laboratoires du monde. Nous les avons dans les Yvelines parce que nous avons su les attirer. Nous leur fabriquons l’outil qui leur permettra d’être encore meilleurs. Ce Département prépare l’avenir. La recherche, c’est la richesse de demain.
Le Département est aussi très engagé dans le projet X-Campus à Saint-Germain-en-Laye. Nous faisons encore l’IUT Mantes-la-Jolie. Nous finançons en partie le RER Eole. Et nous faisons plein de choses que personne ne voit : je pense à l’aide sociale à l’enfance. On a inventé un dispositif pour les jeunes adultes qui souhaitent poursuivre des études au-delà de 18 ans. C’est un Département qui croit au progrès, qui croit que l’homme se nourrit du progrès.
Pour Eole, on en est où ?
L’infrastructure Eole sera prête à la dernière date donnée : fin 2026. Il y a de grandes incertitudes sur le cadencement puisque la société choisie pour le réglage du nombre de RER n’est pas encore un matériel au point. Il y a une incertitude sur le nombre de RER qui vont circuler. J’espère que cette incertitude sera rapidement levée. C’est un investissement considérable et un outil de renaissance de la vallée de Seine prodigieux.
Ligne Nouvelle Paris-Normandie : « Le danger s’éloigne »
Et la Ligne Nouvelle Paris-Normandie qui fait du bruit dans le département avec beaucoup d’opposition de la part des élus : pensez-vous que ce projet sera arrêté ou différé ?
Je pense et je le souhaite. J’ai été partisan d’une partie de la Ligne Nouvelle Paris-Normandie, dans sa partie Est, de Mantes à Paris. Je pensais qu’elle pouvait améliorer le cadencement de la ligne E. Lorsque j’ai découvert qu’on voulait nous infuser du fret de nuit avec des nuisances en grande quantité, j’ai changé d’opinion. Nos mobilisations ont fait le reste et le schéma directeur de la Région Île-de-France ne prend plus en compte cette ligne nouvelle. La situation budgétaire de l’État étant ce qu’elle est, de la SNCF également, je pense que le danger s’éloigne. Mais la vigilance reste à l’ordre du jour.
Se représenter en 2028 : il botte en touche
Vous êtes président jusqu’à mars 2028. Vous allez vous représenter ?
Je vais présenter les choses différemment. J’ai été réélu président en 2014. Donc dix ans plus tard si je suis à mi-mandat, je suis peut-être encore là jusqu’à 2034 (il sourit). Allez savoir. C’est trop tôt pour se poser ces questions. Ce qui est certain c’est que ma vie politique a commencé, il y a un certain temps. Des réalités s’imposent nous. Tant que je suis utile à ce territoire que je crois avoir toujours servi avec générosité et le caractère qui est le mien et de l’avoir fait avancer, je ne me pose pas la question de savoir ce que je vais faire pour mon confort personnel. C’est le territoire qui importe. Nous avons encore le temps. Trois ans en politique, peut-être 4 ans, en politique ça s’appelle une éternité. »
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