Dans les Yvelines, un (pas si) inattendu musée de la culture soufie

Chez les soufis, le contact avec Dieu passe par l’art, le chant ou la transe. À Chatou, cette voie mystique de l’Islam se découvre dans un musée… prévu depuis un demi siècle !

C‘est en terre impressionniste, sur les rives de la Seine, à Chatou, dans les Yvelines, prisées au XIX^e siècle par Renoir, Monet et consorts, que le musée d’Art et de Culture soufis MTO a ouvert ses portes à la fin de septembre, concrétisant un projet porté par l’école de soufisme Maktab Tarighat Oveyssi (MTO) Shahmaghsoudi depuis plusieurs décennies. « Le projet de consacrer un lieu à la culture soufie remonte aux années 1970 », rappelle Alexandra Baudelot, la directrice du musée. Qui précise que le soufisme « est la branche mystique, ésotérique de l’islam » ; il est fondé sur la connaissance de soi.

Musique, poésie, peinture, architecture, calligraphie…

Installé dans un hôtel particulier du XIX^e siècle joliment restauré – les éléments d’origine, tels que les corniches des murs et des plafonds, les carreaux de mosaïque, le fronton néoclassique et le bleu outremer des ferronneries de la façade, ont été préservés –, le musée met en lumière les liens entre les principes du soufisme et l’art sous toutes ses formes : musique, poésie, peinture, architecture, calligraphie… Quelque soixante-dix objets sont présentés dans la collection permanente, à commencer par certaines pièces à haute valeur symbolique, tels ces deux khirqa, nom du manteau transmis entre maîtres soufis, ou cette série de kashkul, terme persan désignant les bols à aumônes. « Les kashkul sont très représentatifs de la culture soufie, notamment des derviches, explique Alexandra Baudelot. Utilisés autrefois comme sacs, ils sont devenus des objets ornementaux. »

Autre élément phare de la visite : la reconstitution d’un bureau iranien des années 1970, rempli d’objets ayant appartenu à Hazrat Shah Maghsoud, le quarante et unième maître de l’école MTO, à l’origine du projet de ce musée. Mort en 1980, ce dernier apparaît, par la magie de l’hologramme, pour dispenser une leçon sur le tawhid (unicité).

Un lieu de dialogue contemporain

Le musée se veut aussi un lieu de dialogue entre les principes du soufisme, et la culture et l’art d’aujourd’hui ; une dimension « fondamentale », souligne la directrice. Ainsi, l’exposition inaugurale, « Un ciel intérieur », présente des œuvres qui entrent en résonance avec la spiritualité soufie, signées de sept artistes contemporains. Parmi eux, l’Iranienne Monir Shahroudy Farmanfarmaian, dont les dessins et les mosaïques de verre taillé ont été influencés par l’architecture de la mosquée Chah-Tcheragh, à Chiraz ; la Thaïlandaise Pinaree Sanpitak, qui revisite dans ses peintures le symbolique kashkul ; ou encore le Zimbabwéen Troy Makaza, dont les œuvres colorées, à base de silicone tissé, explorent la transformation des éléments et le symbolisme des plantes, thèmes importants dans le soufisme.

Une transition toute naturelle pour achever la visite par le jardin, mélange de style occidental et d’influence persane, et particulièrement propice à une déambulation méditative.

Chronologie Express
VII^e siècle
Naissance du soufisme et de l’école Maktab Tarighat Oveyssi.
Années 1970
L’idée de créer un musée consacré à l’art et à la culture soufis naît sous l’impulsion de Hazrat Shah Maghsoud, maître de l’école MTO.
2010
Rachat de l’hôtel particulier à Chatou.
2021
Nomination d’un comité scientifique pour la rédaction du projet scientifique et culturel du musée.
2024
Ouverture du musée d’Art et de Culture soufis MTO.

Source

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